La relève - Morgan Baillet, ancien apprenti et aujourd’hui chef d’entreprise

La relève - Morgan Baillet, ancien apprenti et aujourd’hui chef d’entreprise

Depuis plus de 50 ans, le BTP CFA Picardie forme des apprentis qui deviennent des professionnels passionnés. Avec “La relève”, nous mettons en lumière des parcours inspirants d’anciens apprentis, dont la réussite fait rayonner leur métier et nos CFA.

Aujourd'hui, nous rencontrons Morgan, apprenti couvreur de 2006 à 2010 au CFA d'Agnetz.

Peux-tu te présenter ?
Je m’appelle Morgan Baillet, j’ai 34 ans et je suis gérant de l’entreprise qui porte mon nom. Nous faisons principalement de la couverture, de la zinguerie, du bardage et de l’isolation de combles.
J’ai créé mon entreprise en 2016 : aujourd’hui, nous sommes 6 salariés et cela fait déjà 10 ans que je me suis installé à mon compte.

J’ai commencé l’apprentissage en 2006 au CFA d’Agnetz, j’y ai fait un CAP puis un BP Couverture-Zinguerie. Après mes 4 ans d’apprentissage, je suis resté dans l’entreprise Bregon à Breteuil. Malheureusement, l’entreprise a fermé en 2015 après la maladie et le décès du patron. J’ai ensuite travaillé un an ailleurs, mais cela n’a pas fonctionné, et j’ai alors décidé de me lancer seul en 2016.


Qu’est-ce qui a provoqué le déclic ?
Quand mon expérience salariée n’a pas marché, je me suis dit : « Si je retourne dans le salariat, je prends le risque que ça recommence ». Alors j’ai sauté le pas.

Je n’avais pas fait d’études pour être chef d’entreprise, mes parents n’étaient pas entrepreneurs non plus. Mais je me suis entouré : une comptable que je connaissais déjà, et un mois après mes débuts, Damien m’a rejoint. Nous nous connaissions depuis 2010 : j’étais son chef d’équipe chez Bregon et nous avions toujours gardé contact. Quand je l’ai appelé, il a fait son préavis et est venu. Aujourd’hui, cela fait 10 ans qu’il est à mes côtés : il est chef d’équipe et gère une partie des chantiers.


Comment es-tu arrivé dans le bâtiment et plus particulièrement dans la couverture ?
Depuis tout jeune, j’aimais bricoler avec mes oncles. En 3ᵉ, j’ai aidé l’un d’eux à construire un garage, du gros œuvre à la couverture. Au départ, j’étais attiré par la charpente, mais les places en apprentissage étaient rares. M. Bregon, compagnon charpentier, m’a expliqué qu’il n’avait pas assez d’activité en charpente pour prendre un apprenti. Je suis revenu le voir en lui demandant s’il pouvait m’embaucher en couverture… et c’est comme ça que je suis devenu couvreur.


Tu n’as jamais envisagé un lycée général ?
Non. Pourtant j’étais bon élève – j’ai eu le brevet avec mention – mais je n’aimais pas rester assis en classe. Mes professeurs voyaient l’apprentissage comme une voie « de garage », réservée à ceux qui n’avaient pas d’avenir… Heureusement, ma mère m’a soutenu. Elle voulait que je fasse ce qui me plaisait, et moi, je voulais être dehors, travailler de mes mains. Ce qui était au départ un loisir avec mes oncles est devenu mon métier.


Quels souvenirs gardes-tu du CFA ?
Le CAP n’a pas été la meilleure période : il y avait trop de différences de niveau, certains ne savaient même pas pourquoi ils étaient là.
En revanche, le BP a été une excellente expérience : un petit groupe, des jeunes motivés qui savaient ce qu’ils voulaient faire, beaucoup de maturité… C’étaient de très bonnes années.

J’ai aussi gardé un lien fort avec M. Lesieur, mon formateur. Je l’ai eu en CAP, et même après, nous sommes restés en contact. Lui aussi avait travaillé chez Bregon, ce qui nous rapprochait. Aujourd’hui encore, il m’accompagne : par exemple, nous avons récemment signé un gros chantier en joint debout, une technique que je n’avais pas pratiquée depuis le BP. J’ai pu compter sur lui pour envisager une formation adaptée. Le CFA reste un vrai partenaire.


Aujourd’hui, tu es maître d’apprentissage ?
Oui. Depuis 4 ans, j’accueille des apprentis. Hugo a terminé son BP cette année et poursuit avec une mention complémentaire zinguerie, qui n’existait pas à mon époque. Et Lucas commence son CAP en septembre.


Qu’est-ce qui te motive à prendre des apprentis ?
Je n’ai jamais eu à chercher : ce sont eux qui sont venus vers moi.
Dans l’entreprise, nous sommes 6, dont 4 salariés, et tous issus de l’apprentissage et du CFA d’Agnetz : moi, Damien, Yohan et Alexis. C’est logique pour nous de transmettre à notre tour.

Nous savons par expérience que ce n’est pas de l’apprentissage si on laisse un jeune en bas du chantier à ramasser les gravats. Alors nous faisons l’inverse :

  • à 16h30, tout le monde ramasse, apprentis comme salariés,

  • et les téléphones restent dans le camion pour tous

C’est en montrant l’exemple qu’on transmet vraiment.


Qu’attends-tu d’un apprenti ?
Du sérieux, de l’implication et de l’attention. Nous prenons du temps pour leur montrer le métier, donc la moindre des choses est qu’ils soient motivés en retour.


Quels conseils donnerais-tu à un jeune qui démarre ?
D’abord, penser à sa sécurité. La couverture reste un métier dangereux et physiquement exigeant. Dans l’entreprise, j’ai beaucoup investi pour réduire la pénibilité : échafaudages modernes, manitou, treuils, outils de levage… Aujourd’hui, ces équipements facilitent vraiment la vie.
Ensuite, être sûr de son choix. Beaucoup s’engagent dans le bâtiment sans aller au bout. C’est pourquoi je conseille de toujours tester avant de s’engager ! Hugo avait fait un mois en juillet, Lucas 15 jours. Quand on sait vraiment à quoi s’attendre, on est plus motivé.


Et aux entreprises qui hésitent à former ?
Aujourd’hui, il existe de vraies aides financières. Pour un apprenti CAP, elles couvrent près de 80 % du salaire. Pour te donner une idée, un CAP coûte environ 800 € par mois avec les paniers-repas, et je reçois 560 € d’aides. Le CFA et ma comptable m’accompagnent dans les démarches.
C’est un vrai coup de pouce, mais cela ne dispense pas de jouer le jeu : former un jeune, c’est préparer l’avenir de l’entreprise.


Un chantier dont tu es particulièrement fier ?

Oui, en 2022, nous avons refait la toiture de l’église de Campremy. J’ai grandi dans ce village et aujourd’hui j’y ai mon entreprise !


Un dernier mot ?
L’apprentissage m’a permis de construire mon parcours. Aujourd’hui, je transmets à mon tour, avec mon équipe.

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Hugo, Morgan, Damien et Yoann lors de la bénédiction du coq de l'église de Campremy en 2022.

Morgan et M Commelin, maire de Campremy

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